Le deuil de l’enfant imaginé

Chroniqueuse :
Madame Christelle Lefèvre
Questiologue, Spécialiste en relations, formatrice, conférencière

Les parents de notre époque investissent beaucoup leurs enfants. C’est assez récent dans l’histoire de l’humanité. Il y a quelques siècles, le taux de mortalité infantile était tellement élevé que les parents, certainement par protection, ne s’autorisaient pas à s’attacher à leurs enfants.

Au siècle dernier, avec les moyens de contraceptions et l’émancipation de la femme, une dimension de choix et de contrôle est apparue. Cette révolution a créé un impact déterminant dans la vie des familles avec ses nombreux avantages et aussi ses effets sociaux. Le taux de natalité a dramatiquement chuté au Québec. Avec presque 1,9 enfant en moyenne par femme (statistiques de 2015, il était de 1,7 en 2012). On est loin des familles de 15 enfants des générations précédentes.

Du coup, aujourd’hui, on « planifie » nos enfants. On veut contrôler le contexte et tous les paramètres entourant son arrivée et son évolution. Cela devient un projet de vie qui est parfois surinvestit.

Surinvestit par notre imaginaire et notre capacité de projection dans le futur. On se créé des scénarios, encouragé par les modèles sociaux de notre époque. On s’imagine comment sera notre grossesse, notre parentalité, notre enfant, que fera-t-il dans la vie, quel sport il pratiquera, à quel moment il reprendra l’affaire familiale, de la fierté que vous aurez et l’admiration qu’il suscitera, que vous susciterai par ricochet, dans votre entourage etc. Avant, il y aurait bien eu un enfant dans la fratrie qui entrerait dans notre modèle mais à présent les chances sont réduites alors la pression est forte.

La pression est forte sur l’enfant de manière évidente. Dans quelle mesure peut-il être lui-même et libre de ne pas répondre aux modèles que ces parents ont voulus pour lui?

Alors quand l’enfant naît, qu’il grandit et ne correspond pas à ce modèle, les parents peuvent le vivre comme un échec qui sera directement proportionnel à l’importance qu’ils avaient attribué à ce rêve.

Peut arriver aussi une grande déception, un fort sentiment de culpabilité et un deuil douloureux.

Soyez conscient de ces attentes que vous vous êtes créées. Choisissez de traverser les étapes du deuil de cet enfant imaginé que vous avez construit dans votre tête. Traversez le déni, la négociation, la colère, la tristesse puis l’acceptation de cet enfant dans l’ordre qui sera le bon pour vous, avec des allers retours dans ces états émotifs parfois intenses. Autorisez-vous à vivre toutes ces étapes sans jugement et sans culpabilité. Elles font toute partie du processus de guérison. Accueillez-les.

Prenez du recul, faites-vous confiance, et surtout faites confiance en votre enfant. Lâchez prise sur vos attentes inconscientes. On peut s’épanouir de toute sorte de façon, et même si le parcours peut sembler chaotique, cela ne veut pas dire qu’on ne peut pas y trouver bonheur et épanouissement. Je dis souvent que c’est dans les détours de la vie qu’on fait les plus beaux apprentissages. Souvent, ce sont justement ces apprentissages qui font notre force et nous prépare le mieux à être heureux. Alors ceci n’est peut-être qu’un cadeau mal emballé?!

Vous avez des questions? Écrivez-moi sur le blogue!!

Leave a Reply

Your email address will not be published.